Dialogue impossible: peurs et limites

Août 23, 2021

 

Je n’arrive pas à faire passer le message.   » Ce que tu proposes, ça ne marchera jamais, les actionnaires veulent un retour sur investissement et toucher leurs dividendes ». Ou « oui mais…  personne ne veut renoncer à sa voiture ou à manger de la viande, il faut être réaliste… »

Après une énième tentative de dialogue terminée en queue de poisson, j’ai réalisé que je n’arrivais pas à convaincre du besoin immédiat de changer notre système, en particulier agricole – la manière de nous nourrir et de produire notre alimentation: énergies, transports, santé, économie, entre autres. Après plusieurs répétitions du verbe « réduire » et de son synonyme « diminuer »: notre consommation de viande, nos kilomètres motorisés, mon empreinte écologique, l’impact de mon habitation, de ma machine à laver le linge, de ma manière de penser en vase clos, une phrase de Rob Hopkins m’est soudainement revenue en mémoire:  » You cannot build a world you haven’t imagine before ».

Et là j’ai réalisé: quel futur est-ce que je dessine avec des restrictions et des « il n’y a qu’à »? Je vulgarise, alerte, synthétise les dernières études au niveau de la biodiversité et des politiques climatiques, sans jamais m’être donné le temps de mettre  en mots le futur dont je rêve – des rues sans voitures, des assiettes sans pesticides ni produits transgéniques, des échanges au sein d’une communauté qui travaille moins, qui rit plus, qui s’entraide…

Usbek et Rica, le magazine du futur en ligne, titre aujourd’hui sur une prise conscience mondiale:  Ispos Mori, un réseau de plus de 70 groupes internationaux travaillant sur le développement durable, lançait en avril dernier un vaste sondage en ligne auprès de 20 000 personnes âgées de 16 à 75 ans, vivant dans les pays du G20, sondage commandé par la Global Commons Alliance. L’objectif ? À travers une cinquantaine de questions, dresser un instantané de l’opinion publique mondiale sur le changement climatique en cours: parmi l’ensemble des habitants des pays du G20, 73 % des personnes interrogées pensent que l’activité humaine pousse notre planète vers un « un point de non-retour ». Si la nouvelle est bonne en soi, la mobilisation qui va en découler est loin d’être acquise: seules 8% des personnes interrogées sont au courant du consensus scientifique sur le besoin de changer radicalement nos systèmes sociétaux.

Si le sondage avait, pour conclure, demandé aux participant-e-s de fermer 5 minutes leurs yeux et d’imaginer la rue dans laquelle elles ou ils aimeraient vivre, quelle nourriture dans leur assiette, le rythme de travail dont il rêve, entre autres: les faits et les chiffres auraient, peut-être, été accompagnés d’une prise de conscience des peurs qui limitent nos passages à l’acte…

No climate change but system change. A commencer par mon imaginaire et mon langage.